Personnages:
DJAMILEH (mezzo-soprano)
HAROUN (ténor)
SPLENDIANO (ténor)
UN MARCHAND D'ESCLAVES
Le Palais d'Haroun, au grand Caire
No. 1 - Choeur et Rêverie
Au lever du rideau, Haroun et Splendiano sont en scène - Splendiano accroûpi devant une table basse et écrivant - Haroun étendu et fumant
CHOEUR
les hommes chantent à bouches fermées
Le soleil va; ramène ta voile
C'est la fin du jour,
Et vers l'Orient, vers l'Orient la première étoile
S'allume, invitant notre âme à l'amour!
de plus près
Le soleil va; ramène ta voile
C'est la fin du jour,
Et vers l'Orient, vers l'Orient la première étoile
S'allume, invitant, invitant notre âme à l'amour!
HAROUN
Dans la blonde fumée
Qui monte parfumée
Vers le soleil mourant,
Naissent de blancs atômes,
Impalpables fantômes
De mon rêve enivrant, de mon rêve enivrant!
Et je vois, lumineux cortége,
Je vois leur corps de neige
Flotter, flotter encor.
Et des formes exquisites
S'ébaucher indécises,
S'ébaucher indécises
Dans la poussière d'or!
Il rêve. Splendiano s'est assoupi peu à peu.
Djamileh entre par un porte latérale traverse lentement la scène et disparaît après avoir jeté un regard plein de tendresse sur Haroun qui ne la remarque pas
CHOEUR
Le soleil va; ramène ta voile
C'est la fin du jour,
Et vers l'Orient, vers l'Orient la première étoile
S'allume, invitant, invitant notre âme à l'amour!
Dialogue
...
SPLENDIANO
Vous n'avez aucun regret?
HAROUN
Aucun...
No 2 - Duo et Couplets
SPLENDIANO
Songez-y bien?
prétentieusement
à la fleur près de naître,
Il ne faut qu'un rayon ou qu'une goutte d'eau!
Au fond de votre coeur fermé comme un tombeau,
Un doux germe d'amour attend aussi peut-être
Les larmes d'une femme ou son regard vermeil!
Songez-y bien, Seigneur, songez-y bien!
HAROUN
railleur
Vieux rhéteur, laisse donc ta pluie et ton soleil!
Mon âme est un désert, et si par aventure
Une fleur s'y cachait, il faudrait, je t'assure,
Pour la faire sortir, brillante du néant,
Plus qu'une goutte d'eau, mon cher...un Océan!
SPLENDIANO
Il ne faut qu'un rayon, Seigneur! songez-y bien!
HAROUN
Laisse donc ton soleil, vieux rhéteur!
SPLENDIANO
Djamileh, cependant, est belle!
HAROUN
Elle est venue
Ou trop tôt ou trop tard.
D'ailleurs, destin promis aux fragiles amours,
Elle a comme toujours
Une rivale, hélas!
SPLENDIANO
Vraiment?
HAROUN
riant
Vraiment!
SPLENDIANO
Et cette rivale... c'est?
HAROIUN
L'inconnue!
Celle que l'on n'attend pas
Qui vient à l'heure ignorée,
Par le dieu hasard parée
Des plus séduisants appas!
SPLEMDIANO
Oui, celle qu'on n'attend pas!
Qui vient à l'heure ignorée,
HAROUN
Oui, celle que l'on n'attend pas
SPLENDIANO
Oui, celle qu'on n'attend pas
HAROUN, SPLENDIANO
D'irrésistibles appas
Est parée!
HAROUN
Celle que l'on n'attend pas
SPLENDIANO
Celle que l'on n'attend pas
HAROUN
Qui vient à l'heure ignorée
SPLENDIANO
Par le hasard est parée.
HAROUN
Est parée des plus séduisants appas!
SPLENDIANO
L'inconnue,
HAROUN, SPLENDIANO
l'inconnue
SPLENDIANO
l'inconnue
HAROUN, SPLENDIANO
l'inconnue
SPLENDIANO
Celle que l'on n'attend pas
l'inconnue,
HAROUN
Celle que l'on n'attend pas,
HAROUN, SPLENDIANO
l'inconnue!
SPLENDIANO
Tout va bien!
HAROUN
Aime donc Djamileh!
Quant à l'autre...
Fais à ton gré, mon cher!..
SPLENDIANO
Mon goût n'est pas le vôtre...
L'esclave...
HAROUN
Eh! choisis-moi celle que tu voudras.
Couplets
HAROUN
Tu veux savoir si je préfère
La mauresque aux yeux languissants,
Ou bien la juive au front sévère,
Ou la grecque, ivresse des sens?
Dans mon coeur, foyer plein de cendre,
Tout est glacée, je le sens bien!
Mon souvenir y peut descendre
Hélas! il n'y rallume rien...
il n'y rallume rien! hélas! non, rien!
Que l'esclave soit brune ou blonde,
Je cède au charme tour à tour,
Je n'aime aucune femme au monde, aucune femme...
J'aime l'amour! j'aime l'amour...
l'amour... l'amour! l'amour! l'amour!
Ah! j'aime l'amour, oui, j'aime l'amour!
SPLENDIANO
se frottant les mains
C'est fort bien dit! et pour le projet qui me tente
Votre morale est rassurante,
Votre morale est rassurante...
Et pardieu! je ne m'en plains pas!
Djamileh! tu m'appartiendras!
HAROUN
Dans la coupe qu'elle caresse
Ma lèvre en feu n'a qu'un trésor:
Le vin qui nous verse l'ivresse
Dans l'argile comme dans l'or!
Pourvu qu'il ait la même flamme,
Le métal peut changer cent fois,
Si l'amour parfume mon âme,
Qu'importe la source, la source où je bois?
Qu'importe?.. qu'importe?..
Que l'esclave soit brune ou blonde,
Je cède au charme tour à tour,
Je n'aime aucune femme au monde, aucune femme!...
J'aime l'amour! j'aime l'amour!
SPLENDIANO
riant
L'amour!
HAROUN
L'amour!
SPLENDIANO
L'inconnue!
HAROUN, SPLENDIANO
L'inconnue!
HAROUN
Celle que l'on n'attend pas
Qui vient à l'heure ignorée,
Par le Dieu hasard parée
Des plus séduisants appas!
SPLENDIANO
Oui, celle qu'on n'attend pas!
Qui vient à l'heure ignorée,
HAROUN
Oui, celle que l'on n'attend pas
SPLENDIANO
Oui, celle qu'on n'attend pas
HAROUN, SPLENDIANO
D'irrésistibles appas
Est parée!
HAROUN
Celle que l'on n'attend pas!
SPLENDIANO
Celle que l'on n'attend pas
HAROUN
Qui vient à l'heure ignorée,
SPLENDIANO
Par le hasard est parée.
HAROUN
Est parée des plus séduisants appas!
SPLENDIANO
L'inconnue,
HAROUN, SPLENDIANO
l'inconnue
SPLENDIANO
l'inconnue
HAROUN, SPLENDIANO
l'inconnue
SPLENDIANO
Celle que l'on n'attend pas,
l'inconnue,
HAROUN
Celle que l'on n'attend pas,
HAROUN,SPLENDIANO
l'inconnue!
Dialogue
HAROUN
Puis, tu sais...
SPLENDIANO
Oui, oui,
à part, en sortant s'il l'aimait!
No 3 - Trio et Ghazel
HAROUN
prenant la main de Djamileh
Quelle pâleur est sur ta joue?..
Quelle ombre furtive à glissé
Sur ton front si pur où se joue
Un rayon à peine effacé?
DJAMILEH
sombre
J'ai fait un rêve!
HAROUN
Enfant!
il l'ambrasse au front
DJAMILEH
montrant un visage radieux
Ah tiens! tout est passé!
HAROUN
Mais encor?
DJAMILEH
Je voyais au loin la mer s'étendre
Et gronder, et gronder autour de moi;
Vainement, vainement je voulais tendre
Mes bras defaillants, mes bras vers toi.
Sous mes mains s'ouvrait le vide
Et dans le désert des flots,
La mer couvrait, voix perfide,
Mes appels et mes sanglots!
La mer couvrait mes cris et mes sanglots!
HAROUN
Folle!
DJAMILEH
Haroun, tu dis vrai, peut-être j'étais folle,
Oui, je sentais en moi, comme un pressentiment...
HAROUN
à part
Cette pensée en ce moment...
Peut elle se douter?
DJAMILEH
Mais un mot me console
Et je bénis mon tourment,
Puisque le rêve qui s'envole,
avec tendresse
Me rend ta voix plus douce et ton coeur plus aimant!
HAROUN
à part
De l'amour, pauvre enfant!
Splendiano rentre précédant les esclaves qui portent et servent le souper
HAROUN
à Djamileh
Chère, laissons nous vivre,
Le sourire fleurit sur ta lèvre, oublions
Les rêves insensés qu'un doute pourrait suivre, Djamileh!
Mets-toi là, près de moi! soyons gais, et soupons!
SPLENDIANO
épanoui
Bien dit: bien dit: soupons!
DJAMILEH
Ah! L'aîle d'un rêve ets legère
L'aîle d'un rêve est legère
Une image passagère
Rendait mon front soucieux!
ah rendait mon front soucieux.
Mais il parle et j'espère,
Mais il parle et moi j'espère...
C'est un avenir prospère
Que je lis dans ses yeux!
Il parle et moi j'espère...
Oui, c'est un avenir prospère
Que je lis dans ses yeux!
HAROUN
Oui, l'avenir a son mystère;
Qu'il soit funeste ou prospère,
Je n'en suis pas soucieux.
Cette heure m'est chère;
Le vin rit dans mon verre
Et le plaisir et le plaisir, oui le plaisir dans tes yeux!
SPLENDIANO
Oh! beauté pure en qui j'espère
Bientôt viendra l'heure chère,
L'heure où je te dirai mes voeux!
Que le vin coule à plein verre!
Philtre charmant qui doit faire
Voire l'amour dans ses yeux,
Voire l'amour dans ses yeux!
Voire l'amour dans ses yeux!
HAROUN
avec bonté
Je veux te voir heureuse,
O Djamileh! et ton bonheur peut être
Espère encor quelque chose de moi?..
DJAMILEH
surprise
Que puis-je désirer?..
HAROUN
La liberté!
DJAMILEH
simplement
Pourquoi?
Je ne demande rien, mon maître
Je suis heureuse en ta maison,
Mon âme ne saurait connaître
De plus radieux horizon!
De cette âme un instant troublée
Toute crainte s'est envolée,
Ta voix m'a rendu la raison, non, non,
je ne demande rien, mon maître.
SPLENDIANO
avec en train mirant son verre
Oh! que la vie est bonne et me semble enviable
Alors qu'on est à table
Et que l'on voit le monde au travers de ceci!
HAROUN
Il a raison, buvons ma belle!
Puisque dans la coupe étincelle,
Le vin qui charme le souci!
DJAMILEH
Aucun souci ne m'inquiète
Et pour avoir le coeur en fête
Oui, pour avoir le coeur en fête
Je n'ai besoin que d'être ici!
HAROUN
Si ta lèvre repousse
Cette blonde liqueur
Djamileh!
Dis-moi quelque chanson, notre ivresse est plus douce
Quand la berce,
Une voix au murmure enchanteur!
DJAMILEH
Haroun, ta servante est prête
Ton désir est ma loi!
SPLENDIANO
qui est allé chercher un luth sur lequel il prélude comiquement; à part
Va! chante pour lui, ma fauvette,
Bientôt tu chanteras pour moi!
il donne le luth à Djamileh
Ghazel
Djamileh prélude
DJAMILEH
simplement
Nour-Eddin, roi de Lahore,
Est fier comme un dieu!
Il est beau comme l'aurore
Il est beau,
Ses yeux sont de feu!
Quand son regard, flèche ardente,
Est posé sur moi,
Je reste toute tremblante, toute tremblante,
Je ne sais pourquoi!
Ah! Nour-Eddin, Nour-Eddin est fier comme un dieu,
Il est beau comme l'aurore!
Ainsi parlait dans un rêve,
La naïve enfant!
Ainsi parlait la naïve enfant
Aveu timide qu'achève
Un coeur triomphant!
douloureusement
la la la la la la
la la la la la la.
Lorsque le Roi dans la foule
S'éloigne à pas lents,
Un ruisseau de larmes coule
Sous mes cils, sous mes cils tremblants!
D'où vient l'émoi qui m'agite!..
Et d'où vient aussi
Dès que son regard me quitte, hélas! d'où vient
Que je pleure ainsi?
Ah! lorsqu'il s'éloigne à pas lents,
Un ruisseau de larmes coule sous mes cils tremblants!
Ainsi voulait la pauvre âme,
Trouver le secret, le secret
De cette invisible flamme de cette flamme
Qui la dévorait!
douloureusement
la la la la la la
la la la la la la.
HAROUN
interrompant doucement Djamileh
L'histoire sans doute est des plus touchantes,
J'en sais la fin...
à part
Cherchons des images riantes.
à Djamileh
Enfant, laissons
Dans les buissons,
Enfant, laissons
La fleur flétrie,
Et dépensons
Gaiment la vie,
À nous l'ivresse et les chansons!
Enfant laissons
Dans les buissons,
Enfant, laissons
La fleur flétrie,
Et dépensons
Gaiment la vie,
À nous la folie et les chansons!
DJAMILEH
Laissons, laissons
La fleur flétrie,
Et dépensons
Gaiment la vie,
À nous l'ivresse et la folie
À nous l'ivresse et les chansons!
Laissons, laissons
La fleur flétrie,
Et dépensons
Gaiment la vie,
À nous l'ivresse et la folie
À nous l'ivresse et les chansons!
HAROUN
Enfant laissons
Dans les buissons,
Enfant, laissons
La fleur flétrie,
Et dépensons
Gaiment la vie,
À nous la folie et les chansons!
SPLENDIANO
Laissons, laissons
Dans les buissons
La fleur flétrie
Et dépensons
Gaiment la vie,
À nous l'ivresse et les chansons!
DJAMILEH, HAROUN, SPLENDIANO
À nous les chansons!
À nous, à nous l'ivresse et les chansons!
Dialogue
DJAMILEH
Moi, t'en vouloir, maître.
HAROUN
Tu es charmante!
No 4 - Scène et Choeur
HAROUN
Ah! je t'ai ménagé une surprise.
SPLENDIANO
avec intention
Une jolie surprise!
HAROUN
prenant des mains de Splendiano un collier qu'il passe au cou de Djamileh
Regarde!
DJAMILEH
Ah! le beau collier! il est digne d'une reine!
SPLENDIANO
à part
Il fait bien les choses!
HAROUN
Eh! bien?
DJAMILEH
Ce que j'aime le mieux en lui pourtant c'est...
HAROUN
C'est?
DJAMILEH
La main qui le donne!
HAROUN
faisant un geste d'insouciance, puis prenant la main de Djamileh
Enfant, tu entres dans la vie; tu es bonne et aimante; le bonheur t'est promis sans doute, souviens-toi de moi!
Djamileh le regarde toute interdite
SPLENDIANO
J'entends vos amis, vous allez jouer encore ce soir?..
HAROUN
Comme toujours! il ne faut pas être inconstant.
bas
C'est la fin de la comédie, tu m'as compris?..
Splendiano fait un geste d'assentiment
HAROOUN
C'est bien!
Haroun va à la rencontre de ses amis
LES AMIS D'HAROUN
Salut! salut! seigneur Haroun.
HAROUN
leur serrant les mains
Amis, amis, je vou salue,
Joyeuse bienvenue
À ceux que parmi nous la fortune conduit!
Ah! Nous allons jouer follement cette nuit!
LES AMIS D'HAROUN
Oui, nous allons jouer follement cette nuit!
Djamileh, qui n'est pas voilée, s'est mise à l'écart; les amis d'Haroun l'aperçoivent et se la montrent discrètement
LES AMIS D'HAROUN
Quelle est cette belle
Dont l'oeil étincelle
Et qui s'offre à nous
Sans voiles, sans voiles jaloux?
Voyez, voyez,
Quelle est cette belle
Dont l'oeil étincelle!
Ses lèvres son closes
Et l'oiseau baiser,
Sur ce nid de roses,
Voudrait se poser, oui voudrait se poser!
Son doux front épanche
Sur sa main plus blanche
Que le lis des près,
Ses cheveux ses cheveux ambrés;
Et sur ce nid de roses,
Le baiser, le baiser,
Voudrait se poser!
Elle est sans pareille
Et nos yeux épris
De cette merveille,
Devinent le prix!
Oui, l'oiseau baiser
Sur ce nid de roses,
Voudrait se poser!
Djamileh se détourne en jetant à Haroun un regard de reproche
HAROUN
nonchalamment
C'est Djamileh! venez!
Tandis qu'une voix austère
Du haut du minaret,
Tandis qu'une voix austère
Nous invite à la prière,
Donnons au plaisir nos heures,
Et chassons de nos demeures
L'ennui, cet hôte indiscret, oui donnons au plaisir nos heures
Chassons l'ennui, cet hôte indiscret!
LES AMIS D'HAROUN
Tandis qu'une voix, une voix austère
Nous invite à la prière,
Donnons au plaisir, au plaisir nos heures,
Chassons de nos demeures
Chassons de nos demeures, amis, chassons
L'ennui, cet hôte indiscret!
SPLENDIANO
à part avec une joie comique
Vivat! ma victoire, ma victoire est claire!
Il n'est plus besoin de taire
Mon amour ni mon secret!
Ma victoire est claire
Il n'est plus besoin de taire
Ni mon amour ni mon doux secret.
Je dis, je dis, va-t'en! elle pleure
Je dis, je t'aime et sur l'heure
Elle rit. le tour est fait!
Haroun et ses amis sortent, Splendiano les suit
Dialogue
DJAMILEH
Oubliée, quand là tout à l'heure... oh! je rêve
No 5 - Chanson
CHOEUR
dans la coulisse
La fortune est femme,
Pour qui la réclame
Elle a des rigueurs, oui des rigueurs,
HAROUN, CHOEUR
dans la coulisse
La fortune est femme;
Pour qui la réclame,
Elle a des rigueurs:
Et dans ses caprices,
Et dans ses caprices, dans ses caprices,
Souvent aux novices
Garde ses faveurs;
Mais si le jeu qui nous tente
Fait trouver l'heure moins lente,
Bon ou mauvais soit le destin,
Amis, jouons jusqu'au matin,
jusqu'au matin!
Dialogue
...
SPLENDIANO
Je vais tout disposer selon tes désirs... espère!..
il sort
No 6 - Lamento
DJAMILEH
Sans doute l'heure est prochaine,
Où je mourrai de ma peine!
Puis-je être heureuse encor?
Quel arrêt vais-je entendre?
Le ciel doit-il me prendre
A jamais mon trésor?.. mon trésor?.. mon trésor?
Hélas! une frêle trame
Peut-elle enchaîner cette âme?
Illusion d'un jour!
Un seul regard du maître,
Un seul mot va peut-être
Effacer tant d'amour! tant d'amour! tant d'amour!
Un seul mot! un seul regard! hélas!
Dialogue
...
HAROUN
Venez puisqu'il le veut...
No 6 bis - Mélodrame
SPLENDIANO
Non! je ne veux pas vous imposer mon goût.
appelant
Arakel! le marchand peut entrer. à Hroun et à ses amis Ne vous impatientez pas, vous retournerez tout à l'heure.
Entrée du marchand d'esclaves et de sa suite
SPLENDIANO
Pardieu!.. les belles filles!
LE MARCHAND
N'est-ce pas? oh! le seigneur Haroun est un homme généreux!..
SPLENDIANO
Oui, oui! nous savons cela...
LE MARCHAND
Voyez Seigneur jetez un coup d'oeil sur ces trésors.
HAROUN
Vantard! allons! je m'en vais.
LE MARCHAND
Quoi! Seigneur! vous ne souffrirez pas que je vous dise...
HAROUN
Eh! que m'importe! arrange toi avec Splendiano.
LE MARCHAND
aux musiciens Un seul regard! Allez vous autres!
Une vraie perle, Seigneur, regardez!
No 7 - L'Almée (Danse et Choeur)
CHOEUR DES AMIS D'HAROUN
Froide et lente,
Indolente,
Et les yeux assoupis,
Elle pose
Son pied rose
Sur les fleurs du tapais.
Et comme elle,
Solennelle
La musique s'endort.
Soupir vague
De la vague,
Baisant le sable d'or!
Bientôt sonne
Et l'étonne
L'appel du tambourin;
Bientôt chante,
Frémissante,
La cymbale d'airan!
CHOEUR D'ESCLAVES et MUSICIENS
Lou! lou!
CHOEUR
La danseuse
Paresseuse
Tressaille de plaisir,
C'est un rêve
Qui l'enlève
Et qu'elle va saisir.
Elle danse
Et s'élance
Incessant tourbillon,
Son pas trace
Dans l'espace
Un lumineux sillon!
CHOEUR
Lou lou lou lou
Lou! lou!
CHOEUR
L'amour voile,
Double étoile,
Ses regards languissants,
Et l'ivresse
Qui la presse
S'empare de nos sens!
Quand pâmée,
Blanche almée,
Elle succombe enfin
Délirante
Et mourante
Dans son rêve divin.
Quand pâmée,
Blanche almée,
Elle succombe enfin
Délirante
Et mourante
Dans son rêve
Dans son rêve divin.
Dialogue
...
HAROUN
On nous a fait perdre notre temps.
No 7 bis - Sortie
d'HAROUN et de SES AMIS
Dialogue
...
SPLENDIANO
On n'y regarde pas de si près.
No 8 - Couplets
SPLENDIANO
Il faut pour éteindre ma fièvre
Une douce réalité,
Et je veux boire à pleine lèvre
Ta coupe ardente, ô volupté!
Je vois ma maîtresse sourire,
Timide elle accepte mes lois,
Je vois ma maîtresse sourire
Timide elle accepte mes lois,
O rêve d'amour! O délire!
Je ne sais plus ce que je vois!
O rêve d'amour! ô délire non, non, non, non
je ne sais plus, non, non, non, non,
Je ne sais plus ce que je vois.
Doucement nous serons ensemble
Sous les ombrages parfumés,
Je presse sa main, elle tremble,
Ses yeux languissants sont fermés;
Je me vois sûr de ma conquête
A peine la défend sa voix,
Je me vois sûr de ma conquête
A peine la défend sa voix,
Rien ne m'émeut, rien ne m'arrête,
Je ne dis plus ce que je vois!
Rien ne m'émeut rien ne m'arrête non, non, non, non,
je ne dis plus, non, non, non, non,
Je ne dis plus ce que je vois.
Dialogue
...
HAROUN
C'est bien, plus tard... on m'attend
apercevant Djamileh
tiens, c'est la danseuse!
No 8 bis - Mélodrame
SPLENDIANO
Si vous saviez...
HAROUN
Vas-tu me laisser tranquille... Qu'est-ce que tu me veux donc? regardant Djamileh
tout à l'heure si provocante et maintenant tremblante et inquiète! c'est singulier! Hé! mignonne t'aurait-on dit du mal de moi?
Il veut la prendre dans ses bras, elle se dérobe et s'enfuit vers le fond.
SPLENDIANO
Voulez-vous... il ne m'écoute pas!
HAROUN
la pursuivant
Sauvage! comme elle s'enfuit!
il s'arrête puis riant
Mais c'est délicieux, cette révolte! je reste!
SPLENDIANO
Un mot, je vous prie...
HAROUN
vivement, donnant sa bourse à Splendiano
Prends cet or, va jouer à ma place, va.
SPLENDIANO
Mais...
HAROUN
impatienté
Obéis donc et tais-toi.
SPLENDIANO
à part, sortant
Après tout, je suis tranquille! je sais bien qu'il la congédiera.
No 9 - Duo Final
HAROUN
à part
Est-ce la crainte?
Est-ce un caprice?
Qui l'éloigne de moi?
J'en veux faire l'épreuve.
DJAMILEH
à part
O nuit, sois moi propice,
Protége mon audace!
HAROUN
avec entrain à Djamileh
Elle a peur sur ma foi.
Nous sommes seuls; le ciel est plein d'étoiles!
C'est l'heure qui plaît à l'amour,
Ne tremble plus, laisse tomber tes voiles:
Le temps du bonheur hélas! est si court!
DJAMILEH
suppliant
Seigneur, seigneur de grâce
Laissez mes yeux baissés,
Laissez mes yeux,
De pleurs récents vous dérober la trace...
HAROUN
Ici le plaisir, oui, le plaisir remplace la douleur.
Tes larmes! tes larmes! je les veux essuyer de mes lèvres!
De ces regards dont tu me sèvres
Je veux éprouver la douceur!
Plus de larmes! allons plus de larmes!
DJAMILEH
Seigneur, seigneur! ah! seigneur de grâce,
épargnez ma faiblesse, pitié, seigneur!
Épargnez, seigneur, ma faiblesse!
Notre visage n'est charmant,
Notre visage n'est charmant
Qu'à l'heure où l'amour le caresse,
où l'amour le caresse
De son divin rayonnement!
HAROUN
Oh viens donc, belle maîtresse!
Et laisse sur ton front doux et charmant,
Oui, laisse sur ton front charmant,
Éclater d'une ardente ivresse,
L'ineffable rayonnement!
L'ineffable rayonnement!
DJAMILEH
à part
La frayeur me glace!
HAROUN
L'esclave dont tu prends ici la place,
Avait moins de rigeur,
Et je l'aimais...
DJAMILEH
vivement
Seigneur, Si vous l'aimiez pourquoi l'avoir bannie?
à part
Ah! je crains de m'être trahie!..
HAROUN
Si j'ai dit que j'aimais, ma chère, entendons nous:
Je n'ai pas enchaîné ma vie,
Etre libre est un bien plus doux!
Lorsque ma maîtresse est partie
Il ne restait rien entre nous...
Rien... qu'un souvenir de tendresse;
Avec la dernière caresse
Nos liens, oui, nos liens s'étaient brisés tous!
Djamileh essuie furtivement une larme
Haroun surpris
Elle pleure!
allant vers elle
pourquoi pleurer? t'ai je offensée?
DJAMILEH
entraînée
Ah! vous êtes cruel!
elle s'éloigne
HAROUN
Mais, qu'as-tu donc?
Quoi! tu me fuis encor?
Il la suit. Un rayon de lune éclaire soudainement Djamileh.
frappé d'étonnement; presque parlé
Ah! Djamileh! Oui, c'est elle... insensée!
Elle m'aimait!
DJAMILEH
à part douloureusement
J'espère en vain... son coeur est mort!
HAROUN
à part; avec passion
Si l'amour était un mensonge,
Me sentirais-je ainsi troublé?
Bonheur qui me souris, si tu viens dans un songe,
ah! que je meure avant qu'il se soit envolé!
Ah! si l'amour était un mensonge,
Serais-je ainsi troublé?
il reste muet loin de Djamileh
DJAMILEH
à part
Qu'à ma tremblante voix sa colère réponde...
Que m'importe aujourd'hui?..
Avant d'aller dormir sous la vague profonde,
Je veux me révéler à lui!
avec intention
Cherchant des monts à la plaîne
Son coeur envolé,
Elle allait, contant sa peine, contant sa peine
Au ciel étoilé!
Et sans qu'on en sût la cause,
Cette fleur d'amour
Se flétrit comme une rose comme une rose
Aux ardeurs du jour.
Ainsi mourut l'innocente
Dans son rêve d'or,
A sa vision charmante
Souriant encor!
à part
Il se tait!
allant vers lui et d'un ton suppliant
Maître! grâce! O maître!
HAROUN
Ah! je t'ai reconnu!..
luttant contre lui même
Mais non!.. en vain tu seras revenue...
Je ne veux pas aimer!
à part
non! ce mot qu'elle attend,
Je ne le dirai pas!!
résolument et avec violence
va t'en!
DJAMILEH
Ah!
avec désespoir
Il se jouait de moi!
d'une voix brisée L'amour était ma vie...
O mon maître! mon espérance ravie!
Plus que la liberté c'était toi que j'aimais
Plus que la liberté c'était toi que j'aimais!
Adieu pour jamais!
Elle s'éloigne puis chancelle et tombe dans les bras d'Haroun accouru pour la recevoir.
HAROUN
hors de lui
Ah! chère enfant, c'était une épreuve!
O Djamileh! mon âme, mon seul bien,
Il ne me faut plus d'autre preuve,
En comprenant ton coeur,
J'ai retrouvé le mien!
Ta lèvre parfumée,
Ta lèvre peut cesser de mentir,
mon doute est terrassé, mon doute est terrassé,
O douce bien aimée!
Revenons pour jamais aux beaux jours du passé!
Oui, c'est trop, c'est trop, je cède, je cède
Au plus doux transport!
O Djamileh! L'amour me possède,
Non, mon coeur n'est pas mort!
DJAMILEH
Je triomphe, il cède, il cède
A son doux transport!
Ah! L'amour le possède,
Son coeur n'est pas mort!
HAROUN, DJAMILEH
Ah! viens!
Pour toi je veux vivre!
Ta voix qui m'enivre
A fixé mon sort!
HAROUN
Ah! viens, pour toi, pour toi je veux vivre.
DJAMILEH
Ah! pour toi, pour toi je veux vivre.
HAROUN, DJAMILEH
Oui, ta voix qui m'enivre a fixé mon sort!
DJAMILEH
Ta voix chérie, ta voix m'enivre,
Je veux vivre pour t'aimer!
HAROUN
Je t'aime! je t'aime! je t'aime!
HAROUN, DJAMILEH
Ah! viens!
Splendiano a paru, il fait un geste de désespoir comique! Derrière lui se montrent les amis d'Haroun, à leur vue, Haroun ramène sur le visage de Djamileh le voile qu'elle avait laissé tomber sur ses épaules, puis il passe doucement avec elle.